Vincent Delabouglise
Copain 44
Ferme de Bellevue
44130 Notre Dame des Landes
avec le soutien de la coordination des opposants au projet de Notre Dame des Landes
Monsieur François HOLLANDE
Palais de l’Elysée
55 Rue Faubourg Saint Honoré
75008 PARIS
Lettre ouverte
Notre Dame des Landes le 27 février 2013
Monsieur le Président,
Je suis un paysan, membre du Copain 44 (Collectif des Organisations Professionnelles Agricoles INdignées par le projet d'aéroport), et je participe à ce titre à l'occupation de La Ferme de Bellevue, à Notre Dame des Landes depuis un mois.
Hier encore, des journalistes nous demandaient si cette occupation n'était pas illégale.
Je tiens donc à vous demander solennellement par la présente, de bien vouloir répondre à cette question : Qui, dans ce dossier, est aujourd'hui dans l'illégalité au regard de notre démocratie républicaine?
Est-ce que ce sont les porteurs du projet, qui, ayant obtenu en 2008 la validation d'une DUP construite sur des bases techniques, sociales et économiques de plus en plus remises en cause, tentent de faire passer en force un projet de développement datant de quarante ans, inadapté aux besoins de la société d'aujourd'hui ?
Est-ce que ce sont les organisations d'opposants tels que les élus du CéDpa, le collectif des pilotes qui nie la nécessité du transfert, les citoyens des centaines de comités de soutien à l'ACIPA, les paysans de l'ADECA et du COPAIN 44, qui depuis plusieurs années, en vain, demandent à nos élus, promoteurs du projet, de prendre le temps de la remise à plat de la DUP, afin d'intégrer dans l'analyse l'ensemble des nouvelles données qui n'ont pas été prises en compte?
Est-ce que ce sont les collectivités territoriales du syndicat mixte aéroportuaire qui mobilisent des centaines de milliers d'euros de fonds publics pour occuper les médias et les panneaux d'affichage en posant des affirmations plus que douteuses ?
Est-ce que ce sont les paysans, aidés de tous les opposants, qui excédés par la politique du bulldozer, décident de protéger ce qui peut encore être sauvé, en occupant la ferme de Bellevue ?
Est-ce que ce sont les paysans de Notre Dame qui ont du mener une grève de la faim de 28 jours avant d'arracher un accord de protection face aux expulsions, sans même qu'un seul élu promoteur du projet n'ait daigné venir les rencontrer?
Est-ce que ce sont les opérateurs qui, en dépit des recours en justice non aboutis, et donc, de fait, du possible abandon du projet, continuent impunément à saccager les terres agricoles vivrières en production, par des sondages archéologiques qui s'avéreront probablement inutiles?
Est-ce que ce sont les 40 000 personnes et 400 paysans en tracteurs, venus le 17 novembre dernier exprimer leur refus de ce projet d'un autre âge, et leur soutien à une autre alternative de développement pour notre société?
Enfin, Monsieur Le Président, suis-je dans l'illégalité devant mes enfants, lorsque je veux protéger les terres nourricières, les fermes, les maisons, les paysans et les habitants de la Zad de Notre Dame, face à un projet dévastateur à plus d'un titre, dont l'utilité est loin d'être prouvée?
Je peux vous affirmer, Monsieur le Président, que la cinquantaine de tracteurs vigilants et la centaine de paysans qui occupent Bellevue au nom de milliers d'autres, prêts à intervenir, ne sont pas là pour défendre un pré carré, ou s'opposer au développement de notre territoire, mais bien pour défendre une autre conception du développement pour l'agriculture, la société, l'alimentation et la transition énergétique. Sont-ils dans l'illégalité?
Je renouvelle par ailleurs la demande exprimée depuis de nombreuses semaines d’une rencontre avec vous, sur ce dossier de Notre Dame des Landes. Dans l'attente, veuillez accepter, Monsieur le Président, mes sincères salutations.
Vincent Delabouglise